La question de la preuve des heures supplémentaires constitue une part substantielle des litiges entre employeurs et salariés devant le Conseil de Prud’hommes.
La preuve de l’existence et du nombre des heures supplémentaires effectuées ou non, notamment sur de longue période, peut s’avérer délicate tant pour le salarié qui cherchera à en obtenir l’indemnisation que pour l’employeur qui pourrait les contester en tout ou partie.
Le fondement de l’administration de la preuve des heures de travail effectivement réalisées par le salarié est établi par l’article L. 3171-4 du code du travail qui dispose que :
« En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable. ».
La Cour de cassation avait orienté l’interprétation de ce texte par un arrêt du 25 février 2004 en précisant que si « la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties et que l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande » (Cass. soc., 25 février 2004, n°01-45.441).
La Cour de cassation a néanmoins assoupli sa position à l’égard du salarié par une décision du 18 mars 2020 en adoptant la formule suivante : « Il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. » (Cass. soc., 18 mars 2020, n° 18-10919).
Le salarié doit à présent produire des éléments à l’appui de sa demande, régime de preuve allégé par rapport à son obligation antérieure d’étayer sa demande. Sa demande doit néanmoins toujours être sérieusement soutenue et les éléments produits suffisamment précis (Cass. soc., 4 mai 2011, n° 09-71.810 ; Rapport annuel de la Cour de cassation de 2004).
Par une décision du 27 janvier 2021, la Cour de cassation s’est penchée sur la notion d’élément suffisamment précis en rappelant que cette exigence ne peut avoir pour effet de faire peser la charge de la preuve des heures accomplies sur le seul salarié, ni de contraindre ce dernier à indiquer les éventuelles pauses méridiennes qui auraient interrompu le temps de travail (Cass. soc., 27 janvier 2021, n° 17-31.046).
En l’espèce, l’employeur ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail qui aurait permis de contredire la réclamation du salarié. L’évolution récente de la jurisprudence relative au régime probatoire des heures supplémentaire impose aux employeurs d’adopter des bonnes pratiques de contrôle des horaires des salariés.
Cet article est l’occasion de mettre en avant le travail artistique du photographe SBE552, auteur de la photo d’illustration, dont vous pouvez retrouver le portfolio sur ce lien :